Dans la tradition soufie, l’amour (mahabba) est le pilier des piliers. Allah en est l’objet suprême. Pour y accéder, le disciple doit éprouver ce même amour sincère à l’égard du Prophète, sallâ Allâhu ‘alayhi wa sallam. Ainsi, le cœur s’emplira d’une passion purificatrice. Dans ce poème, cheikh Muhammed al-Madani (1888-1959) exprime son désir ardent (chawq) et le prend, telle une monture, le conduisant à la Présence divine.
Ô ! Hommes de passion, je suis dévoré d’amour ardent et je pleure.
Je suis pris de passion et mes larmes débordent et coulent sous l’ardeur des mes pleurs.
Quand verrai-je de mes yeux la face de mon Bien-aimé?
Mais quand agrémenterai-je mon regard de sa beauté merveilleuse?
O ! Toi, qui me dénigres, ne me reproche pas mon errement parmi les gens !
Ne me reproche pas ces paroles que je dis …et qui disent mon amour ardent !
(En vérité), j’ai cultivé les arts de la passion, afin que je réalise l’Union.
Mon humilité m’est douce, quant elle résulte de l’amour ;
et me vautrer dans la poussière m’est aussi agréable que deux.
L’amour de l’Aimé a attisé l’avidité de mon cœur.
Et voilà ! Je suis triste, je veille (tard), ne désirant rien d’autre que l’Union.
Le meilleur des hommes, le Mustafa (l’Elu) est toujours présent ;
Oh ! Comme je suis incapable de placer la moindre parole qui véhicule ma fidélité avec fidélité.
Ô ! Toi, qui est mon but ; Ô ! Médecin (de mon âme), je n’ai d’autre vœu que Toi ;
Tu es le havre à quoi j’aspire, n’es-tu pas l’ami de mon cœur ?
Sois mon intercesseur, sauve-moi des feux, demain, quand viendra le jour des rendez-vous, afin que j’observe de près la beauté du Maître des hommes.
Sur toi Allah a épandu sa clémence. Ô ! Toi, le meilleur des nobles envoyés.
Ô ! Toi à qui Il s’est manifesté par mille saluts.
(Ainsi que) sur les tiens, sur tes Compagnons premiers qui aidèrent au triomphe de l’Islam.
Un cœur qui s’orne de l’amour du meilleur des hommes connaîtra-t-il vraiment l’errement ?
Yā Rasūla l-Allāhi innī *** bika ‘abdun mustajīr
lam yakhib wa-Allāhi ḍhannī ***fīka yā ni‘ma l-mujīr
Ayyuhā l-‘ushshāqu innī***shā’iqun zāda n-naḥīb
‘āshiqun wa-ddam‘u***minnī fā’iḍun yajrī ṣabīb
Fa-matā arā bi-‘aynī***muḥayyā dhāka l-ḥabīb
Wa-matā ukaḥḥil jafnī***bi-jamālihi l-‘ajīb
lā talumnī yā ‘adhūlī***idhā himtu fī l-warā
wa-idhā ṣaraḥḥtu qawlī***yaḥkī ‘annī mā jarā
bi-funūni l-‘ishqi shughlī***kay anāla waṭarā
ladhdha lī fī l-ḥubbi dhullī***wa-tamrīghī fī ththarā
Zādanī ḥubbu l-ḥabīb*** fī fu’ādī shaghafā
sāhiru l-‘ayni ka’īb***abghī waṣlan wa-kafā
ḥāḍirun laysa yaghīb***khayru l-anāmi l-Muṣṭafā
ghayra annī lā uṣīb***kilmatan bihā l-wafā
yā munāyā yā ṭabībī***laysa lī ghayruk murād
anta qaṣdī wa-marghūbī***wa-anīsī fī l-fu’ād
kun shafī‘ī min lahībī fī***ghadin yawma l-ma‘ād
ḥattā anḍhur min qarīb***jamāla Rabbi l-‘ibād
fa‘alayka Allāhu ṣallā***yā khayra r-rusli l-kirām
wa-‘alayka qad tajallā***bi-alfin mina s-salām
wa-l-āli wa-ṣṣaḥbi l-ūlā***naṣarū dīna l-islām
mā hāma qalbun taḥallā***bi ḥubbi khayri l-anām
Introduction A. Madani.
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4 septembre 2013.