Nous avons l’honneur de vous présenter un témoignage, extrêmement précieux, qui remonte au début du XXe siècle. Il fut rédigé par M. ‘Umar al-Rukbānī (1887-1962) dans un essai autobiographique, intitulé : Mubtada’ Habarī (Début de mon histoire). Il s’agit d’un instituteur tunisien qui a composé une vingtaine d’ouvrages en arabe dont cette autobiographie où il consacre quelques pages à sidi Muhamamd al-Madanī, rahimahu Allah.
« Le témoignage que nous avons trouvé par ailleurs, d’une façon absolument fortuite, concernant le šayhh al-Madanī, témoignage qui nous paraît objectif, dans la mesure où son auteur n’a jamais été affilié à la confrérie madanite, encore davantage sur la personnalité du Maître; car, dans son allocution (cf. son allocution 1943), celui-ci a omis certains détails sur sa vie, qu’il avait jugés probablement insignifiants. Le témoignage en question complète donc ce que nous savons déjà et nous livre le jugement personnel de son auteur ».
1. « … Un matin de l’année 1900, alors que j’étais encore petit et que je fréquentais le kuttāb (école coranique) de la cité du cimetière, rue al-Māzrī, à Monastir, pour apprendre à lire et à écrire, voilà qu’un enfant, conduit par son père, était venu apprendre, lui aussi, les rudiments de l’écriture et s’initier à la lecture… puis, quelque mois après, cet enfant disparut du kuttāb…
2. Et en 1905, quand j’étais élève-normalien à Tunis, je l’ai vu une fois aller à la Mosquée Zaytūna. Depuis lors, il m’arrivait très fréquemment de le voir soit aller à la Zaytūna, soit en revenir avec, sous l’aisselle, son cartable, et cela jusqu’en 1909. Il comptait parmi les élèves les plus brillants de sa génération… Nous ne nous revîmes plus qu’en 1912.
3. (…) Quand j’ai regagné Monastir, j’ai appris qu’un nouvel instituteur avait été nommé à l’école coranique qu’il avait une barbe bien fournie, qu’il portait un gros chapelet autour du cou et qu’il vêtait un cafetan noir. On disait que cet instituteur était éloquent, doué de hautes qualités morales, très cultivé, qu’il était écrivain et poète, qu’il s’adonnait scrupuleusement et rigoureusement aux prières canoniques et qu’il exhortait les gens à la remémoration d’Allah. Je désirai le voir et vouloir faire sa connaissance…
4. Quand j’étais allé chez lui, en compagnie d’un de mes amis, je vis que c’étais ce même enfant que j’avais connu, l’espace de quelques mois, au kuttāb, à Monastir, ce même étudiant qui fréquentait la Zaytūna à Tunis…
5- Le šayh al-Madanī resta de nombreuses années à Monastir, apprenant aux élèves les règles de la langue arabe, les dogmes islamiques, la sunna (Tradition) mohammadienne…il guidait aussi bien les jeunes que les adultes et les vieux vers ce qu’ordonne la religion islamique. Son amour s’ancra dans les cœurs de la plupart des gens de Monastir… et ceux de Monastir savent distinguer le bon grain de l’ivraie, l’imposteur de l’homme véridique et la conduite du šaykh al-Madani nous rappelle les prédécesseurs vertueux (as-salaf as-sālih) ; il faisait du bien à qui lui faisait du mal, préservait sa langue et ses organes de tout ce qui est défendu (par Allah), invitait un grand nombre de murīd-s (disciples) à la Zāwiya, leur apprenait les principes de leur Religion, leur présentait des mets… [[‘Umar al-Rukbānī, Mubtad’ habarī, manuscrit de 93 pages ; archives privées de si Zuhayr ar-Rukbānī, al-Umrān Tunis. L’auteur (1887-1962) était instituteur unilingue d’arabe et avait été écrit quelques vingt-cinq livres traitant de l’histoire, de la grammaire et de la morphologie arabe, de la religion… ; mais beaucoup de ces écrits sont restés encore inédits dont Mubtada habarī, qui est un essai autobiographique. ]]
Traduction de sidi Salih KHLIFA
Présentation A. Madani.